My Kantele (Acoustic Reprise) - Amorphis

16/02/2018

Sorti en 1997 sur un simple EP, My Kantele (Acoustic Reprise) est la preuve que le groupe Amorphis est autant influencé par le folklore finlandais que par le monde du metal.

Amorphis est un groupe formé au début des années 90, originaire d'Helsinki, en Finlande. Mélangeant à ses débuts death et doom metal, il a par la suite - et avec quelques changements de membres - évolué vers un heavy metal moderne, tendant vers le gothique et le mélodique. C'est en 1996 que sort l'album qui les propulsera sur la scène metal internationale : Elegy. Leur caractère progressiste en ressort plus qu'auparavant, influencés par la musique folklorique de leur pays. Les textes des chansons sont elles basées sur les récits épiques du Kanteletar, recueil de poèmes et ballades, écrit par Elias Lönnrot entre 1840 et 1841. Un monument de la culture finlandaise.

l'EP suivant la sortie d'Elegy, My Kantele, contient des morceaux qui auraient pu apparaître sur l'album, ainsi qu'une reprise acoustique d'un des morceaux majeurs d'Elegy, qui donne son nom au disque. Ce morceau est tellement ancré dans l'identité du groupe qu'ils le reprendront nombre de fois, en live ou sur des best of.

Tradition & Ouvertures

Cette reprise acoustique montre l'intérêt du groupe pour le rock des années 70, et leur ouverture à d'autres cultures : par exemple avec l'utilisation d'un accordéon, ou d'une sitar, instrument typique indien (visibles dans le clip vidéo). Ici Amorphis s'écarte du metal, rendant le morceau plus doux et accessible à toutes les oreilles : par exemple, les growls de Tomi Koivusaari de la version originale sont retirés pour ne garder que le chant clair de Pasi Koskinen.

Les paroles de My Kantele sont, comme déjà énoncé plus haut, basées sur les récits du Kanteletar. Mais pourtant la chanson s'y oppose. Elle contredit que le kantele - instrument à cordes pincées finlandais - eût été conçu divinement par Väinämoien, le héros et magicien de l'épopée finlandaise. Esa Holopainen, guitariste fondateur du groupe et auteur de la chanson, décrit là de manière poétique sa conception de la Musique (avec un grand M). Pour lui l'instrument aurait été créé par "des tourments, des malheurs". Il s'agit en fait d'une métalepse, Esa voulant conter que ce sont les malheurs de l'Homme qui l'ont poussé à produire de la musique, et donc des instruments tel le kantele. Ainsi, "Music will not play to please" ("La Musique ne jouera pas pour plaire")... mais plutôt pour chasser notre malheur.

Ce n'est peut-être pas un hasard si une sitar, ou un accordéon jouent sur cette version du morceau. Peut-être le groupe a-t-il voulu illustrer davantage ce caractère universel de la conception de la musique par l'utilisation d'instruments d'origines variées ? Il est vrai que cette conception de la musique se retrouve un peu partout, et à différentes époques : le blues, n'est-il pas né dans les champs de coton, des esclaves noirs nécessitant du courage ? Et, pour revenir en Europe, cette fois-ci en France, en 1650 : que penser de la dernière leçon que Sainte-Colombe donne à Marais dans le film Tous les matins du monde, de Alain Corneau ? "La Musique est simplement là pour parler, [...] la parole ne peut parler."... La Musique serait alors un moyen d'exprimer notre malheur, une forme de catharsis selon lui (et j'ai bien envie de dire qu'il n'a pas tort !).

Pour en revenir à "notre kantele", ce n'est pas pour moi qu'un simple récit interprété par un groupe de metal, je pense que c'est clair à présent.

Entre traditions finlandaises et explorations musicales, Amorphis nous offre ici un morceau qui prouve une richesse culturelle, désapprouvant toute idée reçue sur la sphère metal. Un morceau qui mériterait une plus grande reconnaissance à mon goût !

Sources :